Parmi les animaux sauvages présents en ville, les corneilles font partie de ceux qui se sont les mieux adaptés et multipliés. Leurs cris puissants et leur remarquable agilité pour piller les poubelles font qu’elles ne sont pas toujours appréciées à leur juste valeur par les habitants. Et pourtant, il s’agit d’un oiseau d’une rare intelligence que l’on gagne à observer. Il existe des solutions pour limiter les nuisances. Détail des mesures.

En janvier dernier, j’étais interpellé en tant qu’Echevin du Bien-être des animaux lors du Conseil communal à propos de « la présence en grand nombre des corneilles noires sur le territoire ixellois et les nuisances qu’elles génèrent » par Mme Anne-Rosine Delbart. Cette interpellation m’a donné l’occasion de faire le point sur la situation de cet oiseaux avec la Ligue Royale Belge de Protection des Oiseaux, Bruxelles Environnement et le Service Bien-être animal de la Commune d’Ixelles.
Comment la corneille noire est-elle arrivée en ville ?
Observée à Bruxelles depuis probablement toujours, la corneille noire ne niche dans notre ville que depuis la première moitié du 20ème siècle. Suite à l’urbanisation croissante et l’utilisation de dépotoirs, l’offre de nourriture a augmenté et sa présence en ville s’est étoffée petit à petit. Actuellement, elle niche partout à Bruxelles.
Rôle écologique
La corneille noir est un prédateur naturel d’insectes et de leurs larves (surtout ceux vivant au sol), un prédateur naturel de vertébrés de petite taille et un nettoyeur d’animaux morts (évitant ainsi que les maladies ne prolifèrent). Elle joue donc un rôle important dans l’écosystème.

Législation
A Bruxelles, l’espèce est protégée en vertu de l’ordonnance du 29 août 1991 relative à la conservation de la faune sauvage et de la chasse.
Cette protection implique l’interdiction :
1° de piéger, de capturer ou de mettre à mort les oiseaux quelle que soit la méthode employée;
2° de perturber intentionnellement les oiseaux, notamment durant la période de reproduction;
3° de détruire, d’endommager ou de perturber intentionnellement, d’enlever ou de ramasser leurs œufs ou nids, de tirer dans les nids.
Désagréments causés par sa présence en ville
Dans certains quartiers, la densité de corneilles est devenue importante.
La quantité d’individus dans une région dépend principalement de la quantité de nourriture disponible. A Bruxelles, l’espèce bénéficie de la présence de déchets de nourriture trouvés au sol et/ou dans les poubelles qu’elle visite. Les déchets peuvent alors se retrouver disséminés tout autour. Il semble qu’elle ne déchire pas les sacs poubelle. Mais si le sac est déjà déchiré, elle ne se prive pas pour y rechercher sa nourriture par l’ouverture créée.
La corneille noire est souvent accusée de faire disparaître les petits oiseaux de nos parcs et jardins. La diminution de nombreuses espèces de passereaux est effectivement constatée partout en Europe de l’ouest. Cependant, la prédation naturelle de la corneille noire n’y joue qu’un rôle minime. Ceci n’exclut pas que, localement, la prédation de la corneille noire complique encore la situation déjà précarisée des passereaux. Signalons à ce sujet le résultat d’études européennes montrant un impact bien plus grand du chat domestique sur les passereaux. Enfin, la corneille noire peut s’attaquer aux poussins dans les poulaillers.

Conseils pour mieux cohabiter avec l’espèce
- Dans les parcs où c’est interdit, ne pas donner à manger aux animaux (voir règlement des parcs) ;
- Dans les jardins privés, nourrir les animaux de manière raisonnée. Si vous nourrissez les passereaux en cas de neige ou de gel persistant, prévoir une mangeoire placée en hauteur et entourée d’un système type treillis ne permettant qu’aux oiseaux de petite taille d’accéder à l’intérieur de la mangeoire tout en évitant d’autres espèces non désirées (chats, rats, etc.) ;
- Eviter de laisser de la nourriture pour chats ou chiens à l’extérieur ;
- Fermer les poubelles extérieures avec un couvercle solide (voir ci-dessous) ;
- Dans les jardins, planter des espèces d’arbustes épineux indigènes (aubépine, prunellier) plutôt que des résineux. Les passereaux pourront y construire un nid auquel leurs prédateurs n’auront pas accès;
- Fermer les poulaillers par un toit fixe (un grillage solide devrait suffire).

Distribution de poubelles en dur
L’Echevin de la Propreté publique, M. Nabil Messaoudi, précise que « le service de la Propreté publique d’Ixelles est en train d’organiser la distribution de poubelles en dur dans les quartiers prioritaires, c’est-à-dire les quartiers ou les agents trouvent le plus souvent des sacs déchirés par des animaux. Deux types de poubelles sont distribuées : des oranges pour les déchets organiques (mis à disposition par la Région) et des corbeilles noires pour les sacs blancs (mis à disposition par la Commune). »
Un courrier a été distribué dans certaines rues d’Ixelles l’année dernière invitant les citoyens à venir récupérer ces deux corbeilles à la Commune et les agents constatateurs ont également été distribuer les corbeilles en porte à porte. Ces actions se poursuivront en 2022 en élargissant le nombre de rues. Des distributions seront prévues dans le quartier du Cimetière (déjà équipé de poubelles en dur depuis plusieurs années afin de ne pas attirer d’avantage les corvidés).
Dans le quartier du Cimetière d’Ixelles, la problèmatique des corneilles est accentuée par la collecte tardive des déchets, en fin d’après-midi. Il s’agit d’un ancien accord entre l’agence Bruxelles-Propreté et la Commune pour permettre aux riverains de sortir leurs poubelles le matin au lieu de la veille afin d’éviter que les étudiants « vandalisent » les sacs la nuit. Les déchets restent donc sur le trottoir toute la journée et attirent toutes sortes d’animaux, ce qui est particulièrement problématique pour les déchets des restaurants. Il a été déjà été demandé à plusieurs reprises à l’agence Bruxelles-Propreté d’adapter leurs tournées et de collecter ces déchets tôt le matin.
La Responsable du Cimetière s’est renseignée auprès d’autres cimetières bruxellois qui utilisent des ondes sonores, ou des épouvantails pour tenter d’éloigner les corvidés, mais malheureusement ces moyens s’avèrent inefficaces… les oiseaux s’habituant rapidement.
Photos (c) Thomas-Jean Villanueva
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